©annouchka Gravel Galouchko. Shô et les dragons d'eau (Portrait de Shõ) gouache fine sur papier Arches, 54 cm x 38 cm, 1995. Image tirée du livre Shô et les dragons d'eau, Annick-Press, Toronto
©Annouchka Gravel Galouchko. Shô et les dragons d'eau (L'envol du héron) gouache fine sur papier Arches, 54 cm x 38 cm, 1995. Image tirée du livre Shô et les dragons d'eau, Annick-Press, Toronto
L’album jeunesse Shô et les dragons d’eau (Éditions Annick-Press 1995) que j’ai écrit et illustré, témoigne parfaitement mon désir de sortir de l’ombre les peurs et les cauchemars qui habitent l'humanité et qui sont indissociables de ceux qui ont habités mon enfance et la vie des miens, et de les exposer à la lumière afin qu’ils deviennent énergie créatrice.
Le livre a remporté le Prix du Gouverneur Général du Canada en 1995 pour ses illustrations et le texte a été mis en nomination pour ce même prix. La même année, Shô a remporté le Silver Birch Award Ontarien ainsi qu’une médaille d’argent pour le prix littéraire international Korczak en Pologne. L’album sert aussi d’outil dans les cliniques et les milieux scolaires afin d’aider à guérir la psyché des enfants traumatisés par la guerre.
Hokusaï, un peintre graveur japonais du 17e siècle a été pour moi une inspiration importante pour la création des illustrations de Shô. J’ai d’ailleurs dédié ce livre à cet artiste pour l’honorer de son aide et le remercier d’avoir donné à l’humanité un si riche témoignage de la vie rustique au Japon.
L’histoire de Shô et les dragons d’eau est le fruit d’un parcours spirituel.
J'ai fréquenté durant dix ans un monastère zen qui est de tradition japonaise. Le maître du temple Mukiku Zen Ji nous transmit généreusement ses précieux enseignements. Le zazen (méditation) et le samu (travail physique) étaient des composantes essentielles de la discipline spirituelle. On peut d’ailleurs voir dans le livre Shô une illustration où elle ratisse en vaguelettes du sable dans un jardin de roches. C’est là un jardin inspiré du monastère Mukiku Zen Ji. Aujourd’hui notre maître zen est décédé, mais ses enseignements continuent de nous faire grandir.
J’ai appris que le mot Shô avait plusieurs significations, shô en japonais est l'orgue à bouche chinois , sheng, un instrument qui symbolise le phénix, et dont le son imite l'appel de l'oiseau ; mais aussi, la qualité d'éveil spirituel. Je crois bien qu’inconsciemment j’ai choisi ce nom en résonance avec la qualité d’illumination qui représente mon héroïne. La fillette dans mon histoire est omnisciente, c’est une sage, car elle a atteint « l’autre rive ». Cela signifie qu’elle a atteint la compréhension où l'on reconnaît la nature sacrée de toute chose, celle où l'on reconnaît en soi et en chacun notre « vraie nature » ou notre nature éveillée. Shô est pleinement consciente de cette vie éternelle en elle et, parce qu’elle est pleinement consciente aussi que cette vie est la même dans tous les autres êtres, il lui est facile de les aider. Comme elle voit clair en elle-même : elle voit clair en tous et en toutes les formes de vies. Elle peut donc reconnaître les réels besoins des êtres.
Les trois conditions imposées aux villageois: celle d’arrêter de jeter les cauchemars à la mer, celle d’affronter les démons et celle de partager les fruits de la pêche avec les plus démunis sont les conditions ou les causes altruistes qui permettront à de nouvelles situations plus bénéfiques de se manifester. C’est ce qu’on appelle la loi de la cause à effet.
Ce n’est pas difficile pour moi de personnaliser des objets pour la simple raison que je prends plaisir à donner une allure humaine et fantaisiste à mes arbres, pierres ou objets. Mon inspiration me vient d'une vision que j'ai du monde : comme quoi, tout est vivant. Dans mes illustrations, l'arbre peut marcher, la montagne observer les événements autour d'elle. Une maison habitée par des gens malheureux peut pleurer. Dans l’histoire de Shô, lorsqu’à nouveau le poisson abondera aux repas dans les foyers, les maisons prendront la forme de poissons. Les cheminées en forme de bouche de poisson laissent s’échapper des fumets de soupe. Celles-ci sont un peu inquiétantes, l’odeur du vieux poisson pouvant être épouvantable. Cela nous rappelle la mauvaise odeur de bouche que l'on peut parfois avoir au petit matin et symbolise dans l’illustration que les gens recommencent à accumuler tranquillement leurs cauchemars dans leurs foyers.
Le titre de Shô et les dragons d’eau, ou plutôt son inspiration me sont venus lors d’un festival de cerfs-volants à Montréal. Il y avait un cerf-volant, à mes yeux très particuliers, qui m'a fait vibrer de la tête au pied! Le cervoliste avait enroulé autour de ses reins une longue corde sur laquelle s'alignait une série d’oiseaux blancs découpés. Les oiseaux enfilés sur la corde et agités par le vent montaient dans le ciel en une file étincelante. J’avais l’impression que chaque oiseau blanc était une vertèbre d’une colonne vertébrale humaine géante tendue vers les hauteurs. Le corps et l’esprit du cervoliste étaient très concentrés tout en étant solidement ancrés dans le sol.
À ce moment-là, j'ai senti dans ma colonne vertébrale un flux d’énergie vibrer et s’élever du coccyx vers ma tête. C’était très doux, une sorte de vent intérieur soudainement se réveillait et s’élevait par vagues en moi. Je regardais, un peu ébranlée, le cervoliste très absorbé donner la direction à son cerf-volant. Il m’inspirait. Mes pieds prenaient, à son image, racine dans le sol, car je ne voulais surtout pas m’envoler à tous les vents et risquer de me casser le nez sur le sol. J’avais à ce moment la conviction merveilleuse qu’un même vent, où qu’une même vie, nous animait tous.
Et là, j'ai compris que le feu sacré de l’inspiration, ou qu’un vent subtil, était venu me visiter. Je savais qu'une création naîtrait de cette expérience.
Dans une des illustrations du livre, on peut voir un portrait de Shô avec une chute d’eau à l’intérieur d’elle qui représente son jardin intérieur. Un pont en arc-en-ciel derrière sa tête traverse le paysage où des bouddhas méditent. Ce pont de lumière symbolise pour moi le pont reliant la terre au ciel, unifiant l'absolu aux phénomènes, la manifestation visible du divin en toutes choses, le physique au spirituel : l’harmonie d’un corps et d’un esprit qui se sont intégrés.
Par la suite, le titre de Shô et les dragons d’eau s’est révélé à mon esprit tout naturellement. Bien des cerfs-volants prennent la forme de dragons en extrême orient. Le terme de démons intérieurs pour signifier nos peurs, culpabilités et blocages émotionnels est familier dans bien des traditions. Les dragons dans Shô symbolisent les peurs ou les démons intérieurs des habitants qui sont refoulés dans la mer (l’inconscient) et qui seront mis à la lumière du soleil (la conscience). À cette condition, les dragons pourront s’élever joyeusement vers le ciel et se transformer en Phénix ou Simorg spirituel ! Ainsi, la peur peut être transformée en bonheur et en inspiration créatrice : tout cela n’est-il pas merveilleux et plein d’espoir?
Mon histoire de Shô et les dragons d'eau met en scène des éléments de ma vie psychique si profonds et si importants que ce récit s'est poursuivi dans un nouveau texte. Le livre a pris la forme d'un petit roman jeunesse, en format poche, accompagné d'illustrations noir et blanc et titré Les cerfs-volants ensorcelés, publié chez Leméac, au Canada en 2004.
Le livre a remporté le Prix du Gouverneur Général du Canada en 1995 pour ses illustrations et le texte a été mis en nomination pour ce même prix. La même année, Shô a remporté le Silver Birch Award Ontarien ainsi qu’une médaille d’argent pour le prix littéraire international Korczak en Pologne. L’album sert aussi d’outil dans les cliniques et les milieux scolaires afin d’aider à guérir la psyché des enfants traumatisés par la guerre.
Hokusaï, un peintre graveur japonais du 17e siècle a été pour moi une inspiration importante pour la création des illustrations de Shô. J’ai d’ailleurs dédié ce livre à cet artiste pour l’honorer de son aide et le remercier d’avoir donné à l’humanité un si riche témoignage de la vie rustique au Japon.
L’histoire de Shô et les dragons d’eau est le fruit d’un parcours spirituel.
J'ai fréquenté durant dix ans un monastère zen qui est de tradition japonaise. Le maître du temple Mukiku Zen Ji nous transmit généreusement ses précieux enseignements. Le zazen (méditation) et le samu (travail physique) étaient des composantes essentielles de la discipline spirituelle. On peut d’ailleurs voir dans le livre Shô une illustration où elle ratisse en vaguelettes du sable dans un jardin de roches. C’est là un jardin inspiré du monastère Mukiku Zen Ji. Aujourd’hui notre maître zen est décédé, mais ses enseignements continuent de nous faire grandir.
J’ai appris que le mot Shô avait plusieurs significations, shô en japonais est l'orgue à bouche chinois , sheng, un instrument qui symbolise le phénix, et dont le son imite l'appel de l'oiseau ; mais aussi, la qualité d'éveil spirituel. Je crois bien qu’inconsciemment j’ai choisi ce nom en résonance avec la qualité d’illumination qui représente mon héroïne. La fillette dans mon histoire est omnisciente, c’est une sage, car elle a atteint « l’autre rive ». Cela signifie qu’elle a atteint la compréhension où l'on reconnaît la nature sacrée de toute chose, celle où l'on reconnaît en soi et en chacun notre « vraie nature » ou notre nature éveillée. Shô est pleinement consciente de cette vie éternelle en elle et, parce qu’elle est pleinement consciente aussi que cette vie est la même dans tous les autres êtres, il lui est facile de les aider. Comme elle voit clair en elle-même : elle voit clair en tous et en toutes les formes de vies. Elle peut donc reconnaître les réels besoins des êtres.
Les trois conditions imposées aux villageois: celle d’arrêter de jeter les cauchemars à la mer, celle d’affronter les démons et celle de partager les fruits de la pêche avec les plus démunis sont les conditions ou les causes altruistes qui permettront à de nouvelles situations plus bénéfiques de se manifester. C’est ce qu’on appelle la loi de la cause à effet.
Ce n’est pas difficile pour moi de personnaliser des objets pour la simple raison que je prends plaisir à donner une allure humaine et fantaisiste à mes arbres, pierres ou objets. Mon inspiration me vient d'une vision que j'ai du monde : comme quoi, tout est vivant. Dans mes illustrations, l'arbre peut marcher, la montagne observer les événements autour d'elle. Une maison habitée par des gens malheureux peut pleurer. Dans l’histoire de Shô, lorsqu’à nouveau le poisson abondera aux repas dans les foyers, les maisons prendront la forme de poissons. Les cheminées en forme de bouche de poisson laissent s’échapper des fumets de soupe. Celles-ci sont un peu inquiétantes, l’odeur du vieux poisson pouvant être épouvantable. Cela nous rappelle la mauvaise odeur de bouche que l'on peut parfois avoir au petit matin et symbolise dans l’illustration que les gens recommencent à accumuler tranquillement leurs cauchemars dans leurs foyers.
Le titre de Shô et les dragons d’eau, ou plutôt son inspiration me sont venus lors d’un festival de cerfs-volants à Montréal. Il y avait un cerf-volant, à mes yeux très particuliers, qui m'a fait vibrer de la tête au pied! Le cervoliste avait enroulé autour de ses reins une longue corde sur laquelle s'alignait une série d’oiseaux blancs découpés. Les oiseaux enfilés sur la corde et agités par le vent montaient dans le ciel en une file étincelante. J’avais l’impression que chaque oiseau blanc était une vertèbre d’une colonne vertébrale humaine géante tendue vers les hauteurs. Le corps et l’esprit du cervoliste étaient très concentrés tout en étant solidement ancrés dans le sol.
À ce moment-là, j'ai senti dans ma colonne vertébrale un flux d’énergie vibrer et s’élever du coccyx vers ma tête. C’était très doux, une sorte de vent intérieur soudainement se réveillait et s’élevait par vagues en moi. Je regardais, un peu ébranlée, le cervoliste très absorbé donner la direction à son cerf-volant. Il m’inspirait. Mes pieds prenaient, à son image, racine dans le sol, car je ne voulais surtout pas m’envoler à tous les vents et risquer de me casser le nez sur le sol. J’avais à ce moment la conviction merveilleuse qu’un même vent, où qu’une même vie, nous animait tous.
Et là, j'ai compris que le feu sacré de l’inspiration, ou qu’un vent subtil, était venu me visiter. Je savais qu'une création naîtrait de cette expérience.
Dans une des illustrations du livre, on peut voir un portrait de Shô avec une chute d’eau à l’intérieur d’elle qui représente son jardin intérieur. Un pont en arc-en-ciel derrière sa tête traverse le paysage où des bouddhas méditent. Ce pont de lumière symbolise pour moi le pont reliant la terre au ciel, unifiant l'absolu aux phénomènes, la manifestation visible du divin en toutes choses, le physique au spirituel : l’harmonie d’un corps et d’un esprit qui se sont intégrés.
Par la suite, le titre de Shô et les dragons d’eau s’est révélé à mon esprit tout naturellement. Bien des cerfs-volants prennent la forme de dragons en extrême orient. Le terme de démons intérieurs pour signifier nos peurs, culpabilités et blocages émotionnels est familier dans bien des traditions. Les dragons dans Shô symbolisent les peurs ou les démons intérieurs des habitants qui sont refoulés dans la mer (l’inconscient) et qui seront mis à la lumière du soleil (la conscience). À cette condition, les dragons pourront s’élever joyeusement vers le ciel et se transformer en Phénix ou Simorg spirituel ! Ainsi, la peur peut être transformée en bonheur et en inspiration créatrice : tout cela n’est-il pas merveilleux et plein d’espoir?
Mon histoire de Shô et les dragons d'eau met en scène des éléments de ma vie psychique si profonds et si importants que ce récit s'est poursuivi dans un nouveau texte. Le livre a pris la forme d'un petit roman jeunesse, en format poche, accompagné d'illustrations noir et blanc et titré Les cerfs-volants ensorcelés, publié chez Leméac, au Canada en 2004.
Annouchka Gravel Galouchko, Les cerfs-volants ensorcelés, (Leméac Éditeur) est la suite de Shô et les dragons d'eau
Cérémonie authentique de thé à la galerie Loongese lors du mon vernissage de Bâtir un Pont . Photo de Jocelyn Deschênes
La maison de thé Sakao de Shizuoka nous a gracieusement fait goûter lors du vernissage une variété magnifique de thé
La maison de thé Sakao de Shizuoka nous a gracieusement fait goûter lors du vernissage une variété magnifique de thé